Art thérapie

Art et thérapie, un long chemin…

J’ai commencé à danser très jeune, je pourrais presque dire que je suis passé du tricycle à la barre, et mon enfance, mon adolescence et ma jeunesse se sont structurées autour de la danse. Si j’étais triste, le sentiment se transformait en mouvement. Si j’étais heureuse, les mouvements étaient différents mais ils avaient la même force. Il en fut ainsi jusqu’à la paralysie.

Dans l’immobilité je dansais dans ma tête, comptais les temps de musique, imaginais l’irréalisable.

Mais je me suis reconstruite, je me suis retravaillé comme ces bols japonais qui se reconstruisent grâce à la pratique du kintsugi et j’ai recommencé à danser.
Grâce à cette expérience, j’ai compris à quel point mon corps était précieux et unique. Grâce à cette expérience, j’ai compris que l’art avait été ma bouée de sauvetage… Grâce à cette expérience, j’ai commencé à ressentir un métier qui n’existait pas encore, ou s’il existait, il n’était pas très répandu. L’art-thérapie …
Cette expérience allait organiser ma vie future même si je n’en avais pas pleinement conscience.

Quand, déjà en exil, en France, j’ai découvert un jour que dans le département de psychologie clinique de l’Université de Paris VII ils allaient faire une formation en art-thérapie, je n’ai pas hésité, j’ai postulé à la sélection et ma candidature a été retenue. Nous étions en 1984.

C’était la première fois que des spécialistes étaient formés pour travailler sur le pouvoir thérapeutique de l’art, en France, sous la direction du psychiatre Jean Pierre Klein. Et si aujourd’hui nombreux sont ceux qui revendiquent cette orientation thérapeutique, à cette époque Jean Pierre Klein était un pionnier, qui s’est battu pour faire comprendre sa façon de voir la reconstruction de l’être humain.
Les conditions dans lesquelles s’effectuait la formation au sein de l’université montraient déjà à quel point nous étions considérés au moins comme «originaux». Les classes se déroulaient… quelque part à Paris où on voulait nous accepter… toujours nous prenant comme des gens un peu curieux, mais comme nous étions des artistes… eh bien, ils sont devenus plus tolérants. L’artiste est toujours vu comme un être bizarre.

J’ai pensé écrire ces lignes car une fois, lors du rangement de mon atelier, j’ai retrouvé quelques photos qu’un camarade de formation, Jérôme (que j’ai malheureusement perdu de vue) avait prises et mes souvenirs étaient entre amusants et émouvants.
J’aurais aimé publier avec cet écrit les photos dont je parle mais il y a le droit d’auteur et le seul qui pourrait me donner l’autorisation de les publier est justement Jérôme (c’est pourquoi si jamais mon camarade lit ça, je lui demande l’autorisation de le faire).
Mais, comme je l’ai dit, les souvenirs étaient magnifiques.
La formation a duré deux ans, et la deuxième année nous avons pu faire les cours, les week-ends, au Théâtre de l’ Atelier, à Montmartre… au sous-sol du théâtre. Nous commencions les cours tôt le samedi matin et travallions jusqu’à minuit. Samedi et dimanche.
Au bout de deux ans, Jean Pierre nous a dit que symboliquement ce que nous étudions était comme un mariage entre l’art et la thérapie. Et qu’il voulait le célébrer comme «il se devait», avec une vraie cérémonie. Nous étions déjà en 1986, à la fin des cours.

Et voici la « forme due » imaginée par Jean Pierre : le marié, lui-même, sortirait habillé en grande pompe, accompagné de la mariée, Edith Viarme, également en robe de mariée, et nous tous, les étudiants, formerions la procession que leur accompagnerait jusqu’au temple où aurait lieu le mariage, c’est-à-dire le Musée d’Art Brut, toujours à Montmartre, où le contrat serait lu et l’engagement nuptial serait signé.

Il y avait une courte distance entre le Théâtre de l’Atelier et le Musée d’Art Brut que nous devions faire à pied. Ce qui en d’autres termes signifiait un petit défilé dans les rues de Paris, déguisés sans que ce soit le Carnaval. Défilé signifiait autorisation de la police.
Nous nous sommes rendus au commissariat du secteur pour demander l’autorisation. Le policier qui s’est occupé de nous nous a demandé qui allait défiler et pourquoi. Jean Pierre Klein a répondu très sûr de lui que l’Art, la Thérapie et leur cortège défileraient, à l’occasion de la célébration de leur union de mariage…
Aujourd’hui encore, je me demande pourquoi cet honorable fonctionnaire n’a pas appelé un service d’urgence psychiatrique et nous a plutôt autorisé à défiler du Théâtre de l’Atelier au Musée de l’Art Brut.
Ce même après-midi nous avons défilé, nous sommes entrés dans le musée, le contrat par lequel Art et Thérapie étaient unis a été lu, les époux ont signé, et Jérôme a pris les photos du mariage.

Cela ressemble à une blague… mais cette union dure encore et a donné de nombreux descendants à en juger par la diffusion de cette pratique thérapeutique aujourd’hui, dans divers pays.

Cet esprit d’imaginer l’inimaginable pour la grande majorité, de dire, allons-y, vas-y, c’est ce qui m’a fait évoluer dans le processus de reconstruction de soi grâce aux œuvres que l’on produit. Et c’est ce qui donne du sens à ce que je fais. C’est ainsi que je suis devenu art-thérapeute.

A l’époque où j’ai voulu faire ce chemin en Argentine il n’y avait qu’une autre « original » qui faisait danser les sourds. Une autre pionnière. Il s’agit de Maria Fux, qui aura 100 ans le 2 janvier 2022. Merci, Maria, pour l’exemple de courage.
Une fois de plus il se vérifie que la création est une question de courage.

El arte y la terapia, un largo camino…

Empecé a bailar muy pequeña, casi podría decir que pasé del triciclo a la barra, y mi infancia, adolescencia y juventud se estructuraron alrededor de la danza.

Si estaba triste, el sentimiento se transformaba en movimiento. Si era feliz, los movimientos eran distintos pero tenían la misma fuerza. Así fue, hasta la parálisis. Durante la inmovilidad bailaba en mi cabeza, contaba los compases, imaginaba lo irrealizable.

Pero me rehíce, me retrabajé como a esos boles japoneses que se los reconstruye gracias a la práctica del kintsugi y volví a bailar. Gracias a esa experiencia comprendí hasta qué punto mi cuerpo era valioso y único. Gracias a esa experiencia comprendí que el arte había sido mi tabla de salvación… Gracias a esa experiencia empecé a intuir una profesión que no existía aun, o si existía no era muy difundida. La terapia por el arte…

Esa experiencia iba a organizar mi vida futura aunque no tuviera totalmente conciencia.

Cuando ya en el exilio, en Francia, un día descubrí que en el departamento de psicología clínica de la Universidad de París VII iban a hacer una formación en arte terapia, no dudé, me presenté a la selección y fue retenida mi candidatura. Estábamos en 1984.

Era la primera vez que se iban a formar especialistas para trabajar sobre el poder terapéutico del arte, en Francia, bajo la dirección del psiquiatra Jean Pierre Klein. Y si hoy hay muchos que se reivindican de esa orientación terapéutica, en esa época Jean Pierre Klein era un pionero, que luchó con ahínco para hacer comprender su manera de ver de la reconstrucción del ser humano.

Las condiciones en las cuales se hacía la formación dentro de la universidad mostraban ya hasta qué punto éramos considerados por lo menos como «originales». Las aulas de clase eran…en algún lugar de París en el cual nos quisieran aceptar…siempre como a gente un poco curiosa, pero como éramos artistas…en fin, se hacían más tolerantes. El artista es siempre visto un poco como un bicho raro.

Pensé en escribir estas lineas porque una vez, ordenando mi taller, encontré unas fotos que había tomado un compañero de estudios, Jerome, (al que perdí de vista, desgraciadamente) y mis recuerdos eran entre divertidos y emocionantes. Hubiera querido publicar junto con este escrito las fotos de las que hablo pero existe el derecho de autor y el único que podría darme la autorización de publicarlas es justamente Jerome ( por eso si alguna vez mi compañero de estudios lee esto, le pido la autorización de hacerlo).

Pero , como digo, los recuerdos eran magníficos.

La formación duraba dos años, y el segundo año pudimos hacer los cursos, durante los fines de semana en el Teatro del Atelier, en Montmartre…en el sótano del teatro.

Comenzábamos los cursos los sábados temprano a la mañana y trabajábamos hasta medianoche. Sábado y domingo.

Al cabo de los dos años, Jean Pierre nos dijo que simbólicamente eso que estábamos estudiando era como un matrimonio entre el arte y la terapia. Y que él quería festejarlo como se debía, con una ceremonia en debida forma. Estábamos ya en 1986, en fin de cursos.

Y he aquí la «debida forma» imaginada por Jean Pierre: el novio, él mismo, saldría vestido con gran pompa, acompañado de la novia, Edith Viarme, también en traje de bodas y todos nosotros, los estudiantes, formaríamos el cortejo que los acompañaría al templo en el cual se celebraría la boda, es decir el Museo del Art Brut, siempre en Montmartre, donde se leería el contrato y se firmaría el compromiso nupcial.

Del Teatro del Atelier al Museo de l’Art Brut había una pequeña distancia que debíamos recorrer a pie. Lo que en otros términos significaba un pequeño desfile por las calles de París ,disfrazados sin que fuera Carnaval. Desfile significaba autorización policial.

Fuimos a la comisaría del sector para pedir la autorización. El policía que nos atendió nos preguntó quiénes desfilarían y por qué.

Jean Pierre Klein respondió muy seguro de si mismo que desfilarían el Arte, la Terapia y su cortejo nupcial, con motivo de festejar su unión en matrimonio…

Aun en el día de hoy me pregunto por qué este honorable funcionario no llamó a un servicio de urgencia de psiquiatría y en lugar de eso nos dio la autorización para desfilar del Teatro de l’Atelier al Museo d’ Art Brut.

Esa misma tarde desfilamos, entramos en el museo, se leyó el contrato por el cual el Arte y la Terapia se unían, firmaron los esposos, y Jerome tomó las fotos de la boda.

Parece broma…pero esa unión perdura aun y ha dado muchísimos descendientes a juzgar por la divulgación de esta práctica terapéutica hoy en día, en diversos países.

Ese espíritu de imaginar lo inimaginable para la gran mayoría, de decirse, vamos, adelante, es lo que me hizo evolucionar en el proceso de la reconstrucción de si mismo gracias a las obras que uno produce. Y que es lo que da sentido a lo que hago. Así devine arte terapeuta.

En la época en que yo quería ir por ese camino en Argentina había solamente otra «original» que hacía bailar a los sordos. Otra pionera.

Se trata de Maria Fux, que cumplirá 100 años el 2 de enero de 2022.

Gracias , Maria, por el ejemplo de coraje.

Una vez más se verifica: la creación es una cuestión de coraje.